Imaginez-vous… Vous avez fui votre pays, vous avez déposé une demande d’asile en Suisse et vous avez été attribué-e au canton de Genève. Ce 24 mars, vous vous rendez à l’atelier de primo-information conformément à la convocation que vous avez reçue dans votre langue d’origine.
Dans les locaux de l’Hospice général, à la route de Meyrin 49, vous êtes accueilli-e par Mustafa et Bugra, tous deux coachs communautaires ; ils s’adressent à vous en turc (avec une traduction simultanée en français) car, oui, si vous ne le saviez pas encore, le turc est votre langue maternelle !
La primo-information est un des piliers de l’Agenda Intégration Suisse (AIS) de la Confédération. Dans la vraie vie, elle est délivrée en 7 ateliers sur quelque 10 mois. Découverte de Genève, vie quotidienne, santé, AIS, atelier administratif, vivre ensemble et citoyenneté sont autant de thèmes au programme. Les bénéficiaires sont répartis dans différents groupes en fonction de leur langue maternelle, ils et elles effectueront tout le parcours de primo-information ensemble, ce qui est une manière de favoriser les liens et l’entraide. En 2022, l’Hospice général a organisé 267 ateliers pour 684 personnes.
La vingtaine de personnes qui se sont inscrites à l’atelier de primo-information, sous l'égide du SocialUp, dans le cadre de l’Open Geneva, le festival d’innovation ouverte qui s’est tenu du 16 au 26 mars, ont droit à une version condensée de deux heures. Tandis que la moitié des participant-es rejoignent Medea et Lukman, nous suivons Mustafa et Bugra, qui nous ont accueillis à l’arrivée. Ces personnes sont des bénéficiaires ou ex-bénéficiaires de l’institution ; elles participent à l’élaboration et à la diffusion du programme de primo-information. Employées de la Croix-Rouge genevoise en qualité de coach communautaire, elles ont été initiées à l’animation de groupes par l’Hospice général. Les quatre coachs sont encadrés avec bienveillance par Anaïs, Yann et Patrizia, tous trois coordinateurs à l’Hospice général.
Afin de rendre la réalité des bénéficiaires de l’Aide aux migrants plus palpable, chaque participant-e reçoit un petit dossier et un permis. Permis F admission provisoire avec un logement dans la belle et lointaine campagne au centre d’hébergement collectif de Bois-De-Bay. Les dés sont jetés ! J’envie ma voisine qui est titulaire d’un permis B réfugiée, plus pérenne.
A son arrivée en Suisse il y a 4 ans, Bugra, 33 ans, ne connaissait que trois mots de français : « bonjour », « monsieur », « merci ». C’est la première fois qu’il donne un atelier intégralement dans cette langue. Sa voix est douce et son français est clair, fluide. Missions de l’Hospice général, procédure d’asile, permanences juridiques, renouvellement du permis, ouverture d’un compte postal, système de santé, initiation à Bonjour Genève, la plateforme d’informations dédiée aux migrants… Bugra et Mustafa se relaient avec beaucoup de courtoisie pour nous fournir les informations indispensables à notre intégration à Genève. L’auditoire est attentif et les questions sont nombreuses.
Dans une autre vie, Mustafa, qui était éditeur dans son pays, est venu en Suisse comme touriste. Aujourd’hui, il y vit avec l’étiquette de réfugié. Il explique combien il lui a été difficile d’accepter le changement de statut social et de se réorienter professionnellement. Bugra raconte quant à lui que son activité de coach lui redonne un sentiment d’utilité, lui qui en Turquie était cadre commercial, avait des activités éditoriales et était actif au sein d’une association en faveur de la jeunesse. Il admet que certains sujets, comme la santé ou la sexualité, ne sont pas faciles à aborder.
Yann Medeiro explique que les 18 coachs engagés par l’Hospice général se réunissent une fois par mois ; ces séances permettent de faire des ajustements en fonction de l’expérience. L’objectif de la primo-information est clair : informer et, si nécessaire, orienter les bénéficiaires vers les structures ou les associations répondant à leurs besoins spécifiques. Mission accomplie pour la volée de ce jour !
Photo 2 : De gauche à droite : Mustafa et Bugra, coachs communautaires accueillent une participante
Photo 3 : De gauche à droite : une participante avec Medea, coach communautaire
