Témoignage de Hassan, intendant social au centre d'hébergement collectif (CHC) du Lagnon
Lundi 6 février au matin
Quand je suis arrivé au travail lundi matin 6 février, un de nos résidents m’a annoncé en pleurs qu’il venait de perdre sa fiancée dans le séisme. C’était le moment où l’on prenait conscience de l’ampleur du drame.
Cette journée a été consacrée à passer des moments devant la télé et à demander des nouvelles des uns et des autres. Au CHC du Lagnon, ce sont entre 15 et 20 personnes dont les familles, voisins et amis ont été touchés, au fur et à mesure que la carte des villes meurtries se dessinait (Kahramanmaras, Gaziantep, Diyarbakir, Hatay, Malitiya, Adiyaman, etc.).
Beaucoup de nos résidents sont d’origine kurde et viennent précisément de ces villes-là. Le choc a été immense. L’angoisse, la détresse et l’impuissance venaient s’ajouter à la tristesse déjà pesante de leur séparation depuis des mois de leur famille. Avec mon collègue Berbati, intendant social comme moi, pris dans la même douleur que nos résidents, nous voulions vraiment faire quelque chose.
Une récolte s’organise à la Migros des Vergers (Meyrin)
Je découvre sur les réseaux sociaux que le gérant de la Migros des Vergers organise en faveur des sinistrés une récolte de biens de première nécessité, nourriture, vêtements, couvertures, médicaments, etc. Je vais le voir pour lui demander de quoi il pourrait avoir besoin. Il m’a répondu de main-d’œuvre, car les dons affluent. Je lui ai répondu qu’il n’y aurait pas de problème.
Entre mercredi et vendredi, on a eu entre 16 et 18 résidents du CHC qui sont allés aider bénévolement. Nous avons emmené certains d'entre eux sur place pour les présenter au responsable, donner les explications et un gilet. Il y avait parmi eux des Turcs, des Burundais, des Azeris et des Afghans. D’autres encore s’y sont rendus après leurs cours de français par leurs propres moyens.
Dans ces moments de solidarité, on le ressent bien, l’être humain n’a ni couleur, ni religion.
La solidarité aussi du réseau de partenaires de l’Hg
Il est apparu rapidement que pour les opérations de tri, nous allions manquer de cartons. Les gens apportaient leurs dons dans des sacs et il fallait absolument pouvoir les trier et les emballer avec méthode.
Comme nous travaillons beaucoup avec les entreprises Ducret et Pelichet, je suis allé les voir. Ils nous ont fourni gracieusement 220 cartons.
Et maintenant ?
Maintenant, c’est le temps de la tristesse. Mais ce qu’il faut retenir de cette participation à cette récolte, c’est qu’elle a su apporter un soulagement à nos résidents (et pas seulement) qui ont pu agir pour leurs familles et leurs amis sinistrés, peut-être même mieux que s’ils étaient sur place.
Pour ma part, j’ai reçu de nombreuses donations que je vais apporter là-bas avec mes enfants pendant la semaine des vacances de février.