Il s’appelle Mahesh Lançon. Il est un des premiers visages que les réfugié-es venu-es d’Ukraine ont aperçu à leur arrivée à Cornavin. De fin mars à fin juin, il a coordonné le Point d’information Ukraine de la gare CFF à Genève. Rencontre.
Le Point d’information a fermé ses portes le 30 juin. Un autre accueil est-il prévu pour les réfugié-es ukrainien-nes à cet endroit ?
Oui, c’est la Croix-Rouge qui a pris le relais le 1er juillet. Un accueil est donc garanti pour les personnes qui arriveraient en train à Genève.
Le conflit en Ukraine a pris tout le monde par surprise. Comment vous êtes-vous retrouvé au Welcome center de Cornavin ?
Je suis passé d’une crise à l’autre. Avant d’être désigné coordinateur, j’ai travaillé durant 11 mois aux admissions d’un centre de test et de vaccination Covid. Lorsque le conflit a éclaté en Ukraine, j’avais terminé ma mission ; j’avais du temps et envie de me rendre utile. Je me suis d’abord engagé en tant que bénévole auprès de l’association Comité Ukraine et, au bout d’une semaine, on m’a proposé de coordonner le Point d’info. J’y ai œuvré durant 3 mois, de fin mars à fin juin.
En quoi consistait votre rôle ?
Tout était à faire au niveau organisationnel. Il fallait gérer l’équipe des bénévoles car on était entre 3 et 7 par tranche horaire et il fallait s’assurer à chaque fois qu’au moins une personne ukrainophone ou russophone soit présente. Notre rôle consistait également à orienter, donner des informations sur la procédure d’enregistrement, l’obtention du permis S, répondre aux questions pratiques concernant les transports, le logement, les télécommunications et fournir de la nourriture et des boissons chaudes. Mais il s’agissait surtout de soutenir les réfugié-es et de les rassurer. Ces trois derniers mois ont été très intenses !
Quels sont vos motifs de satisfaction ?
Je pense que les réfugié-es se sont senti-es bien accueilli-es. J’en croise encore certains de temps en temps. Je suis tombé sur l’une d’entre elles dans le canton de Vaud, elle m’a reconnu et est venue me voir pour me remercier ; une autre m’a offert du chocolat ukrainien. Ce qui me fait chaud au cœur, c’est de voir la différence entre le moment de leur arrivée où elles et ils étaient évidemment défait-es, épuisé-es et maintenant. La plupart ont repris du poil de la bête.
Quels sont les points qui auraient pu être améliorés ?
Nous n’étions pas préparés à tant de détresse ; tout le monde a été très touché, c’était vraiment dur émotionnellement pour les bénévoles et le turn over était par conséquent élevé au sein de l’équipe. En ce qui me concerne, ce qui m’a aidé à tenir, c’est mon vécu, mon propre parcours migratoire : je suis né en Inde et je sais ce que c’est de devoir s'adapter à une nouvelle culture.
Quels sont les moments qui vous restent particulièrement en mémoire ?
Il y en a beaucoup mais il y en a un que je trouve vraiment joli. Deux réfugiées arrivées à quelques heures d’intervalle se sont rencontrées au Point d’info ; elles sont devenues amies et ont pu être hébergées dans la même famille d’accueil. Après quelques jours de repos, elles se sont toutes deux engagées comme bénévoles pour aider leurs compatriotes.
Enfin, quelles sont vos perspectives pour l’avenir ?
J’ai d’abord pris une semaine de repos quand le Point d’info a fermé. J’avais besoin de me ressourcer physiquement et émotionnellement. Pour ce qui est de l’aspect professionnel, j’aimerais trouver un poste à l’étranger pour une mission humanitaire ou dans l’aide aux réfugié-es à Genève. Et, dans l’intervalle, je vais entreprendre un voyage en interrail. Je vais passer du point d’info de la gare Cornavin à une autre gare (sourire) !
Propos recueillis le 5 juillet 2022