Domos, un projet interinstitutionnel pour que les locataires en difficulté de paiement conservent leur logement
Tirant les enseignements de la pandémie, pendant laquelle de nombreuses personnes ont connu d'importantes baisses ou variations de revenu, le canton a travaillé avec les milieux immobiliers et de défense des locataires pour monter le projet Domos. Celui-ci prévoit l'octroi rapide d'une aide financière en faveur des locataires rencontrant des difficultés financières passagères et qui ne touchent pas de prestations sociales, afin qu'ils puissent s'acquitter de leur loyer et éviter la résiliation de leur bail.
Domos, ce sont au départ deux constats dressés par le canton. Premièrement, la crise pandémique a montré que le filet social existant, essentiellement basé sur des prestations sous condition de ressources (et découlant donc de calculs relativement complexes), était en partie inadapté pour faire face aux changements brusques de situations personnelles en termes de revenus. Deuxièmement, le paiement de loyer figure au premier rang des dépenses à assurer, dans la mesure où le droit du bail prévoit des conséquences drastiques pour les locataires en cas de non-respect des échéances contractuelles.
Aussi, le dépôt de plusieurs objets parlementaires (projets de lois, résolutions) relatifs au soutien aux locataires privés durant la période de pandémie, témoigne de l’importance politique de cette problématique.
Un partenariat qui se poursuit
Ayant déjà collaboré en 2021 dans le cadre d'un courrier commun destiné aux locataires risquant une résiliation de bail et fournissant à leur attention les principales adresses où se rendre pour trouver de l'aide, le département du territoire, l'Union suisse des professionnels de l'immobilier (USPI Genève), la Chambre genevoise immobilière (CGI) et l'Hospice général ont à nouveau répondu à l'initiative du département de la cohésion sociale d'imaginer un projet commun visant à aider financièrement les personnes rencontrant des difficultés financières passagères.
"L'un des enseignements de la pandémie dans le domaine social est que les collectivités publiques doivent se doter d'outils d'intervention plus souples et plus rapides pour faire face aux situations d'urgence se présentant lors d'accidents de la vie", a relevé Thierry Apothéloz, conseiller d'Etat chargé de la cohésion sociale. "Ces situations sont autant dues à des facteurs exogènes tels que la crise du COVID-19 qu'à des causes inhérentes au parcours de vie des personnes concernées."
Le projet Domos a ainsi été élaboré grâce à l'ensemble des partenaires mentionnés ci-dessus et avec l'appui de l'Asloca. Il faut dire que du point de vue de l'action sociale, les dépenses liées au logement sont jusqu'à présent considérées au même titre que toute autre dépense courante. Ainsi, les législations fédérale et cantonale en matière de protection sociale ne leur confèrent pas un statut particulier.
Intervention de l'Unité logement de l'Hospice général
Prévu pour une première période pilote de deux ans à partir du 1er juin prochain, le projet Domos concrétise le souci de l'Etat de prévoir une intervention en amont dans la prise en charge des frais de loyer en faveur des habitantes et habitants connaissant des baisses de revenu temporaires et ne disposant dès lors pas de prestations sociales.
Dans le détail, en cas de mise en demeure pour non-paiement de son loyer, toute personne détentrice d'un bail d’habitation la liant à une entité membre de l'USPI Genève ou de la CGI (i. e. la plupart des régies de la place) se voit proposer d'être mise en relation avec l'Unité logement de l'Hospice général. Celle-ci évalue alors rapidement si un soutien financier ponctuel – sous forme d'un don provenant d'une fondation privée – peut être octroyé pour le paiement du loyer dû (et éventuellement de loyers supplémentaires), en fonction de la situation financière de la requérante ou du requérant. Par son fonctionnement, Domos garantit, en cas d'éligibilité, un versement du loyer dans un court délai. Cela permet d'éviter des procédures liées à une résiliation de bail.
Pour Antonio Hodgers, conseiller d'Etat chargé du département du territoire, "Domos est un dispositif indispensable, qui vient renforcer la politique sociale du logement et qui permettra, au moyen d’une action préventive et ciblée, de ne pas rallonger davantage la liste des personnes en attente d'un logement subventionné."
Une solution gagnant-gagnant
Pour les locataires du canton, cette solution offre non seulement l'avantage du maintien du logement, mais également la possibilité de détecter les situations à risque, lors de l'évaluation faite par l'Hospice général.
Pour les propriétaires et les régies, Domos constitue un outil favorisant la stabilisation de la situation financière des locataires et, partant, un règlement du loyer dans les délais légaux. De même, ce partenariat interinstitutionnel a vocation à diminuer les coûts administratifs, financiers et temporels inhérents à des procédures plus lourdes telles qu'une expulsion.
"Cet accord s’inscrit dans la continuité du partenariat initié avec les accords VESTA, au début de la pandémie. Les régies immobilières font office de trait d’union entre les locataires et les propriétaires afin que ce type de solutions puisse se mettre en place dans l’intérêt de tous. L’USPI Genève remercie l’ensemble des acteurs et tout particulièrement les régies et leurs collaborateurs, sans lesquels ce type de projet ne serait pas possible", a indiqué Thierry Naz, président de l’USPI Genève.
Pour Christophe Aumeunier, secrétaire général de la CGI, "ce dispositif est innovant et bienvenu car son caractère préventif évite une éventuelle accumulation de retards de paiements de loyers, qui rend ensuite les choses très difficiles à rattraper. Au contraire, ici, le bailleur sera rassuré et le locataire trouvera une aide professionnelle auprès de l’Hospice général de sorte que toutes les chances sont mises de son côté pour que le bail soit maintenu."
Un comité de pilotage regroupant les partenaires sera chargé du pilotage stratégique et de l'évaluation finale du projet.